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PEINTURES : LES "TÊTARDS"

Têtards, personnages sans âge, enfants par la disproportion de leur tête ou vieillards, ces êtres semblent se reconnaître, d’un tableau à l’autre, d’une même famille.

 

Tête encombrante et lourde de ceux et celles qui ont tout à apprendre du monde et en même temps tout à désapprendre. Ces êtres portent une mémoire qui se lit sur leurs visages dans les creux de leurs rides, mémoire emprunte de tristesse et d’effacement autant que de survie et d’espoir de vie. Visage creusé, nécrosé, visage brûlé, en partie effacé, visage déformé, les yeux enfuis vers les extrémités, les nez malformés, les bouches à peine dessinées comme cousues, la tête souvent penchée vers soi-même. 

Difficile de savoir quelle histoire portent ces êtres, ils semblent l’accepter sans être pour autant résignés. Galerie de personnages en attente ou se laissant parfois conduire à leur destin. Ils ne craignent pas de se montrer ainsi avec leur petitesse. Leur corps parfois s’oublie par sa forme épurée ou prend plus de place, par exemple dans les signes de la féminité. 

Ils portent souvent des êtres plus petits, leur ressemblant sans vraiment savoir si ce sont des enfants ou des doudous. Ces doudous au visage simplifié sont-ils le reflet de leurs peurs ? Sont-ils là pour les rassurer de leur existence et les retenir encore à la vie ? Les têtards s’y raccrochent comme à une preuve de leur matérialité. 

Peu de sols, peu de fond, les tableaux et dessins peuvent être aériens, même si un sol est souvent imaginable. On ressent le poids des corps lorsqu’ils se portent les uns les autres. À d’autres moments, les corps s’oublient dans des transparences comme si les personnages étaient en partance ou au contraire en cours d’incarnation.

Seuls ou en groupe, ces êtres nous reflètent l’image tendue d’une humanité qui lutte pour sa dignité au-delà des disproportions et des malformations.

 

Têtards. Dans ces regards aussi vides qu’expressifs, chercher encore à apprendre de l’homme dans ses faiblesses et ses difficultés à être et grandir. Se laisser un peu guider par ces êtres déformés, aux frontières de l’imaginaire, vers le chemin ardu du regard sur ses propres ombres.

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